“Εγώ, σχέφτηχε ο μικρός πρίγκιπας, αν είχα πενήντα τρία λεπτά για ξόδεμα, θα πήγαινα ήσυχα ήσυχα σε μια πηγή”
“Moi, se dit le Petit Prince, si j’avais cinquante-trois minutes à dépenser, je marcherais tout doucement vers une fontaine…”
La pluie a séché. Il y a un fort au-dessus d’Agia Marina, mais c’est un peu loin. Pas grave; j’ai des chaussures et j’ai 53 minutes! L’envie, aussi … Mais ça ne fait pas tout: c’est très très lent de ne pas “faire”, de ne pas “vouloir”, de ne plus trop s’inquiéter si l’on va manger, si ça ne fera pas trop loin, si au retour .. et patati, et patata … Le moment présent n’est pas un but. C’est un état. Avec ses frontières, ses heures heures d’ouvertures et puis ses coups de pot ou non.
On ne se rend pas compte mais d’en haut on voit plusieurs anses, distantes. Sur la photo à gauche des moulins on aperçoit celle d’où je viens, tout en haut, là où j’ai laissé PONYO, au sud de l’autre côté de l’île. La baie de droite est au nord de celle de gauche, le chateau entre les deux. En le disant comme ça j’ai l’impression de marcher sur la planète du Petit Prince. C’est un peu ça une île .. enfin .. pas l’Australie ..
Pas de chance le fort est fermé le vendredi. Le restaurant de droite n’ouvre que fin mai. Le bon côté c’est que le parking est désert.
En redescendant je croise un jeune homme qui vient aussi de Lakki. Un autre allumé, je me dis. Mais il n’est pas marin. Il est hollandais et il travaille pour la Frontex (frontière extérieure) : en clair il s’occupe de la surveillance des “réfugiés” en “partenariat” avec les garde-côtes grecs. Il y a un gros camp à Lepita, la première chose qu’on aperçoit quand on rentre dans la baie de Lakki. D’après lui il y a 1000 personnes … ça me semble beaucoup est-ce qu’il ne m’a pas dit cent? Je vérifie sur internet. On parle d’un peu plus de 2000 personnes.
Ils arrivent depuis la Turquie, du côté de Farmakonisi en face de Didim. Ils essayent de passer la nuit. Il a repêché deux noyés la semaine passée, la veille, je ne sais plus. Oui ça continue, me dit-il. Je regarde la mer en bas, on aperçoit deux voiliers qui essayent de gagner vers l’Est. Dans une deuxième dimension.