LIMNOS

Une grand île un peu à l’écart pour attendre une météo propice pour la remontée des Dardanelles, couloir dans lequel s’engouffre le vent de Nord-Est depuis Istanbul et la mer de Marmara.

Temps gris, vent d’Est, froid. Quelques photos pas très belles depuis le fort d’où la vue doit être magnifique par beau temps… Chevreuils, brebis à poils longs étonnantes et vieilles pierres turques…

          

(baie côté Est…)

         

(… et Baie côté Sud, de l’autre côté du fort Ottoman et des brebis laineuses. Le bâtiment est une poudrière, enterrée pour la soustraire aux canonnades; les allemands ont repris l’idée en 1940 en maçonnant de nombreuses grottes naturelles)

AGIOS EVSTRATHIOS, SUR LA ROUTE DE LIMNOS

Avec l’abandon du projet initial Nord Egée,  Mont Athos, Samothrace… il faut bien trouver une autre cohérence dans la suite du voyage. EVSTRATHIOS sur la carte, est une petite île perdue, rugueuse, peu attractive, à 40 MN de la dernière des Sporades, à 20 de LIMNOS. C’est l’île anti-touristique par excellence! Petit port bétonné, quelques vieilles maisons, quelques rues “carrées” plus récentes et sans trop de charme.

Le trajet est long, j’ai pris du retard, j’arrive la nuit, après un seul bord vent travers à 6,5-7 noeuds avec un ris! PONYO est sur un rail, et heureusement car la mer est encore un peu formée après le coup de nord des jours précédents.

A presque 22h la taverna accepte de me servir et je suis accueilli dans ma langue par Nikos, un chirurgien gréco-suisse d’une grande courtoisie, et son fils Panayiotis,  polytechnicien diplômé de Lausanne .. La seule  autre table est occupée par une dizaine de lyonnais! Je dévore! Pour une fois il y a de la raie (en friture) et aussi de la purée de fèves et du Krassi (vin) Aspro (blanc).

Le lendemain, mes amis suisses de VINARIUS, qui ont également changé leurs plans, accostent en fin d’après-midi. Eux aussi affectionnent les lieux sauvages épargnés par le gros du tourisme. Alors pourquoi ne pas rester un peu plus, aller marcher.. d’autant que le soir Panayiotis nous conseille une belle balade sous les chênes dans le nord-est de l’île?

       

       

 

4 heures de marche dans le vent sur les hauteurs; quatre heures de bonheur! La population de l’île, 150 personnes environ, est concentrée dans le port. Quelques fermes dispersées comme celle d’Odysseas et Antonia, qui arrêtent leur pick-up à notre hauteur quand nous redescendons; à l’arrière des bidons de lait de brebis qu’ils apportent au bourg pour la fêta. Travail, vie rude, solitude, rêve d’une existence plus facile. Vue de notre côté gens bien vivants, lumineux et amicaux. Mais qui de nous supporterait leur mode de vie sur ces hauteurs, dans cette petite île au milieu de la mer Egée, malgré le Ferry, internet, peut-être, et le soutien sympathique de cette petite communauté d’EVSTRATIOS?

Le soir à la taverna nous parlons avec Maria de l’île, des touristes, de l’école, des enfants. Seule taverna de l’île;  où il faut assurer pendant les mois de juillet-août, où les visiteurs stressés d’Athènes ou d’ailleurs auraient tendance à demander à ce petit territoire plus qu’il ne peut donner; et à repartir dès le lendemain… : “ah, il n’y a que ça à voir?..”. Tout le monde n’est pas à la retraite, tout le monde n’est pas disponible.

Aussi quand Maria nous demande ce que nous voulons manger et que nous lui répondons “ça dépend, qu’est-ce que vous avez?”, prend-elle le temps de nous parler un peu d’ici. En saison ça ne lui sera plus possible: les clients arrivent jusqu’à 23h et elle a quatre enfants.

 

(petit souvenir déposé par un inconnu, que nous trouvons au matin dans le cockpit de nos bateaux: des roses de jardin, divinement parfumées!)

KYRA PANAGIA, BAIE DE PLANITIS. HORS DU MONDE.

Retour vers les Sporades. Les îles au nord d’Alonissos sont protégées, à des degrés  divers qui vont de l’interdiction de mouiller à celle d’y poser le pied, voire d’en approcher.        Retour plus laborieux depuis SKYROS car le vent du sud n’égale pas son collègue du nord qui nous transporta si bien à l’aller. Arrivée tardive, dans laquelle il m’est difficile de me replonger dans le concert d’équipiers slaves qui vient d’arriver en flottille au port d’ EVTRATIOS d’où j’écris. A KYRA PANAGIA, pas question d’utiliser l’ordi, le portable, l’AIS, la VHF… Rien.

(quelques signes avant-coureurs dans le ciel)

On a tous en tête les livres de Sylvain Tesson. J’aime cet auteur. Il y a en lui un peu du London, du Melville, du Defoë, Stevenson, du Verne, auteurs dont on ne se soucie pas de savoir si ce qu’ils écrivent est réel, ni même vraisemblable, mais qui on le talent de donner à croire. Ils osent se frotter à l’aventure. Ils dépouillent l’homme de ses artifices pour le confronter à sa solitude sans le priver de sa grandeur. Et cette grandeur réveille la nôtre.

Nord de KYRIA PANAGIA, baie de PLANITIS. Grande anse à plusieurs lobes reliés par une passe étroite. Protection totale de tous les vents. Aucun réseau. Aucun bateau. Bien sûr il ne fait pas moins 30  et je ne reste que quelques jours. Mais le vent mugit au-dessus de nous. PONYO rappelle sur son ancre dans les rafales. Trente noeuds, trente-cinq; peut-être plus. Nous ne reculons pas d’un mètre. Cela permet de dormir sans trop d’inquiétude.

D’ordinaire la solitude à bord est marginale. Beaucoup à faire; à prévoir: cartes, avis des autres navigateurs, météo, blog, téléphone, SMS… en plus de la logistique du bateau,  l’annexe à gonfler-dégonfler, la cuisine, les courses, la propreté, les escales, quelques rencontres, quelques leçons de grec… Je me dis bien de loin en loin qu’il serait temps de partager ce que je vis, ce que je vois, avec quelqu’un de réel… Et puis je n’y pense plus guère, accaparé par mon périple.

   

Ici je pourrais tout aussi bien être en Ecosse, en montagne. Il n’y a pas de distraction. Rien ne me distrait d’être là, aucune présence humaine, aucune musique, pas de radio, de podcast, pas de messages, pas de recherche de mot anglais ou grec sur G-translate. Pas de recherche du tout. A part le premier jour, pas de balades à terre, de photos. Il ne reste que le solide: livres, guitare, cuisine.. Je pourrais pêcher… mais c’est une réserve, et en plus je n’ai pas vu un poisson!

‘La solitude est l’hygiène de l’âme’. Je me rends compte à quel point le virtuel a envahi ma vie. Pourtant je n’ai jamais eu la télé; je ne ‘streame’ pas; n’ai quasiment jamais visionné une ‘série’: un fossile! Pour la première fois depuis que je suis parti je me dis que j’aurais pu amener une ‘playlist’.

Le matin le vent a faibli. Quelques rafales fortes mais espacées. Un peu de soleil. Je vais aller à terre..

… essayer de capter une météo récente sur les hauteurs. Envoyer, recevoir, un message ou deux. Puis planifier la suite: Mont ATHOS? .. mais les distances sont importantes et les mouillages rares. LIMNOS, SAMOTHRACE? Dans tous les cas ce sera minimun 40 milles par jour. Un vent du sud aiderait bien. Rester ici jusqu’à mardi?

Quel bonheur d’être dans un bateau à l’abri du gros temps. Quel bonheur aussi quand le vent cesse,  cesse un peu de vous user le cerveau avec sa plainte lancinante. Ce vent qui permet de voyager. Ce vent qui rend fou.

(Le mont Athos -qu’on aperçoit de partout en mer Egée du nord- ce sera de loin …  après les surprises à la remontée du mouillage! je comprends mieux pourquoi l’ancre tenait si bien!)    

SKYROS, UNE ILE A PART

C’est ici que la mère d’Achille, la divine Téthys, cacha son fils pour l’empêcher de partir à la guerre de Troie, et que le rusé Ulysse le trouva.

J’ai hésité à y aller. Il ne fallait pas . Du vent fort, des vagues, la distance … souvent la météo sous-estime les conditions … En réalité ça a été une navigation de rêve, à plus de 7 noeuds, avec 2 ris et un génois réduit d’une dizaine de tours, 18 à 25 noeuds de vent de NE comme annoncé, plutôt régulier, faiblissant autour de 16 en soirée, de belles vagues mais une mer plutôt ordonnée, Ponyo se régale et mouille assez peu, même si l’on n’est pas tout à fait au près.

On n’atterrit pas à SKYROS-ville, sur la côte nord, mais à LINARIA au sud, là où arrive le Ferry.  Personne à la VHF, nous nous mettons au mouillage jusqu’au lendemain où j’accoste au quai du port. Aide, bon accueil, douche, eau, carburant, wifi (“ouaï-faï”..  comme disent  les grecs)… ou comment joindre l’utile à l’agréable. Je loue même un petit scooter pour aller à SKYROS, et surtout à la Chora, le vieux village en hauteur. Et c’est vraiment très beau.

       

           

                       

Pas trop de monde, juste un attroupement en bas du château car c’est le  jour de la  procession en l’honneur de St Georges,  patron  de l’île, et l’occasion de faire connaissance d’ une charmante dame mi-anglaise mi-grecque avec laquelle je sympathise.

      

J’essaye d’échapper à la cérémonie mais je suis retardé par des motifs gravés  sur une voûte de l’église qui m’intriguent, puis par le sonneur de cloches, et la procession me rattrape;  je descends la rue au milieu des autres, retrouvant cette amie de rencontre, qui a connu SKYROS plusieurs dizaines d’années auparavant  presque sans maisons entre le village et la mer.  Bye bye Johanna, it was nice to meet you!

             

Le soir ouzerie dans un coin du port avec mes voisins de quai, des Suisses avec un beau Bavaria-42-CC qu’on confondrait presque avec un Hallberg-Rassy. Plaisir des rencontres!

Le lendemain re-scooter pour aller visiter la moitié sud de l’île, sauvage, pelée, battue par les vents… Chèvres, brebis, mouettes, abeilles, et quelques uns de ces chevaux indigènes robustes et assez petits, qu’ Alexandre le Grand, qui était plutôt de petite taille, aurait montés. L’île sent la résine (d’ailleurs l’odeur rappelle un peu celle de la résine de cannabis), la brebis, le maquis. Reliefs couverts d’une végétation basse battus par les vents et vue plongeante sur de belles anses désertes.

   

     

Oui, j’ai beaucoup aimé Skyros. Ce soir dans le port il y a davantage de bateaux. Plusieurs français. Musique grecque, un enregistrement d’un concert façon Fest-Noz . Le soir je mange chez Chantal et Markus tandis qu’à côté de l’ouzerie ce sont de vrais musiciens et chanteurs qui interprètent de la musique traditionnelle…

SKIATHOS, SKOPELOS, ALONISSOS… LES SPORADES, LES ILES DISPERSEES…

Temps gris aujourd’hui au mouillage. Pourtant le temps serait idéal pour se rendre à SKYROS, plus au sud, île plus à l’écart et plus sauvage. Mais on ne peut pas toujours courir d’île en île comme un cheval de Poséidon. Et si je visitais vraiment ALONISSOS? Mais reprenons dans l’ordre:

SKIATHOS:  la sans-âme

Depuis le départ certaines îles m’ont plu, d’autres moins. Celle-ci m’a déplu. Certes le lieu est beau, le village construit en hauteur, ruelles, escaliers, maisons plutôt jolies…

                

Mais c’est une des rares îles où j’ai trouvé les habitants antipathiques, anampathiques, maussades, renfermés sur eux-mêmes. J’ai déjà rencontré cette faune à Moustiers-Sainte Marie, Lourdes, Cassis, Arzon … toutes ces villes où, que vous soyez accueillants ou non, les gens reviennent, remplacés par d’autres, innombrables, comme les vagues sans fin de la mer touristique, qui submerge tout. Qui avilit tout. Ces “incontournables” des guides! “Que faire à SKIATHOS? Où prendre un verre? La plus belle plage de rêve? Où sortir? Où manger typiquement grec?”…  Mamma Mia!.. Ah non, ça c’est SKOPELOS!!

C’est d’autant plus perceptible dans cette avant-saison. Centaines de boutiques nichées dans le moindre recoin ‘authentique’  fermées ou en travaux, vendant à peu près tout ce qui peut se transformer en euros, vendeurs-euses l’oreille vissée à leur smartphone, rues sans vie…

 

 

( Tout-en-Plàstikos! )

 

Cela disparaît en juillet et en août, quand le flot des estivants envahit les rues, quand le nombre justifie le nombre, quand  les gens achètent parce qu’ils s’emmerdent et qu’il faut avoir ‘réussi sa semaine’. Retrouver les mêmes choses qu’ailleurs, manger les dix mêmes sempiternels plats de tavernas, se baigner dans les mêmes criques surpeuplées, prendre les mêmes selfies, louer les mêmes engins de plages…

A SKIATHOS il n’y a que ça, et le vieux-village, qui n’a rien de vieux du tout, et est loin d’être le plus joli à faire à pieds.

 

SKOPELOS:  l’intermédiaire

A SKOPELOS cette sensation ne disparaît pas mais s’atténue. Malgré le loueur de catamarans sur le grand quai Ouest qui attend que je sois amarré pour me dire qu’ici c’est pour les professionnels (le quai est quasi vide) et que je dois aller en face.. Les gens sont moins déplaisants. Je cherche en vains un petit bar sympa pour boire une bière, mais ils me rappellent tous les bars de SKIATHOS et je me laisse convaincre par mes pieds pour explorer le village en hauteur. Moins de boutiques, de  RB&B, de House Maria, House Pamela, House  Daniela.. bruits de disqueuse ou de bétonnière. Surtout un village vraiment beau, habité, et un point de vue magnifique tout en haut.

       

 

       

                   

Oui, ça vaut le coup de venir à SKOPELOS, hors-saison tout au moins. Le tourisme n’y a pas tout ruiné.

ALONISSOS:  la verte!

J’y arrive le Vendredi-Saint. Tout est fermé. J’ai  choisi de mouiller dans le petit port de VOTSI, à l’Est de celui de PATITIRI, la ‘capitale’. Mini port où l’on doit s’ancrer en portant une longue amarre à terre, il n’y a pas de place pour ‘éviter’ (tourner avec le vent autour de son ancre). Immobiliser le bateau, mouiller, calculer la distance à la falaise, gonfler l’annexe, charger l’aussière flottante, l’attacher à un rocher, retourner à bord, ‘wincher’ l’aussière jusqu’à ce que le bateau soit perpendiculaire à la falaise. Idéalement il en faudrait deux… Je me dis que je ne suis pas doué, et surtout très lent. Mais un Dufour grec arrive le soir avec plusieurs équipiers et leur amarrage dure jusqu’à la nuit, annexe et lampe frontale…

16h. Petit restau au-dessus, vue sur le bateau. Et je rejoins PATITIRI par la route. J’aurais pu y accoster au quai de la ville. Un voisin suédois de SKOPELOS y est le seul voilier. Calme. Impression de ville endormie. Peu de boutiques. Des restaurants. Il est 17 heures. Pas trop envie mais je pars ‘en repérage’ pour demain vers la Chora, le vieux village tout en haut, 4 km. Pour une fois j’aurais bien pris un taxi. Il n’y en a pas. Pas de bus non plus.

Et je me laisse gagner peu à peu par le charme de l’île. Cette île est belle! Je découvre une campagne boisée, des vergers, des oliveraies, des poulaillers, des maisons qui doivent être agréables à vivre… et j’arrive à la Chora. Pour la descente on verra bien… plus tard. Le vieux village n’est pas si vieux; ou alors tout en haut. Nombreuses maisons,  un peu carte-postale mais jolies, terrasses, ombrages, vieux arbres, chemins empierrés.  En haut quelques vieilles habitations, petites, couleur pierre, qui me rappellent certains hameaux de chez moi, dans l’Aude.  Point de vue sur les deux côtes Ouest et Est impressionnant. Mais TOUT est désert. Cela ne vit QUE pendant les vacances. Le touriste repart, la vie s’arrête.

       

         

 

 

Oui c’est triste, me dit la dame de l’auberge au retour au bateau. Plus de commerces; plus de vie à l’année. Elle a connu autre chose. Le soir une cérémonie pour la crucifixion (orthodoxe) du Christ avec procession et chants a lieu à PATITIRI, me dit un professeur d’anglais à la retraite. Mais je suis un peu fatigué pour y aller puis  rentrer de nuit à VOTSI.

 

 

Aujourd’hui blog et peut-être courses ou location et visite de l’île, selon l’humeur. Il semble qu’il y ait un joli port de pêcheurs un peu plus haut à STENI VALA. Une chose est sûre: je ne regrette pas de me fier à mon instinct. De ‘perdre’ du temps où mon envie me dicte d’en perdre. Même si cette façon de vivre hors tumulte, hors tempêtes, hors injonctions extérieures… n’est qu’une interprétation de la réalité. C’est une des différences entre le tourisme et le voyage.

 

( VOTSI: en saison les bateaux se touchent tout le long de la falaise)

DE L’AUTRE CÔTE

Pour aller vers les Sporades, il faut contourner la ‘tête’ de l’île d’Eubée. Parti de LOUTRA AIDHIPSOU vers l’Ouest vent arrière, j’ai bien cru en arrivant au cap (Acrotirio Lichard)  que le vent de Nord-Est allait virer Sud-Ouest pour nous pousser tranquillement vers l’Est, de l’autre côté, OREI et plus loin TRIKERI.

Mais il ne faut pas rêver. Quand le Nord-Est rentre plein pot dans  Diavlos Trikeri, les cargos eux-mêmes attendent des jours meilleurs pour traverser. Pour le franchir, soit on attend le vent du Sud, soit on remonte au près contre le Nord-Est s’il n’est pas trop  fort, pas trop Est.

Au cap, des courants dans tous les sens, un vent faiblissant … la vitesse du bateau proche de zéro, et .. le vent s’inverse pour de bon. Nous sommes bâbord amure. L’idée est d’aller le plus loin possible vers la mer Egée et de trouver un abri pour la nuit sur la côte continentale, moins exposée; et ça semble fonctionner pendant 2 ou 3 milles. Mais en face une ligne bleu-foncé apparaît avec des jolis moutons blancs à la surface qui défilent de droite à gauche,, et nous sommes obligés de dévier notre route  vers le nord (je rappelle qu’on ne peut pas avancer pile face au vent avec un voilier, ses voiles doivent recevoir le vent avec un certain un angle, autour de 45 degrés).

Qui plus est la moindre crique est occupée par une ferme piscicole, une usine à poissons; alors nous continuons, contre le vent, en nous aidant du moteur, jusqu’à GLYFA où je jette l’ancre. Village sympathique, gens gentils, taverne acceptable et nuit sans trop de houle (on n’est pas loin de lieux historiques comme le défilé des Thermopyles à l’Ouest, le golfe de Trikeri, où une partie de la flotte Perse fut décimée au mouillage dans un coup de Nord-Est, et le cap Artémision où furent trouvés les plus beaux bronzes antiques.

Le lendemain j’avais prévu de passer la nuit à OREI pour voir le taureau de marbre que des pêcheurs avaient trouvé au fond de l’eau, mais le vent nous permet de remonter à 7 noeuds en un seul bord jusqu’ à AGIA KYRIAKI sur la presqu’île de Trikeri.

 

 

Navigation de rêve, petit port magnifique, chemin empierré (par qui?..) jusqu’au village de TRIKERI sur les hauteurs, également très beau et avec une vue superbe. Même mon accostage cul-à-quai laborieux avec un vent de travers assez fort et l’arrivée d’une flottille de 6 bateaux (sur 7 places!) en soirée ne peuvent me faire descendre de mon petit nuage! S’il y a des journées bénies des Dieux qui vous enlèvent tout doute quant au sens d’un tel voyage … celle-ci en est une.

 

 

            ?

 

Petites galeries sans commentaires:

Allez, une petite dernière en redescendant… pour la route!

NORD D’EUBEE

 

 

 

Le pont est passé. Souvenir brouillon d’une dame grecque qui s’empare du canal 12 à 22h, qui parle aussi vite qu’une hôtesse de l’air, au point qu’il me faut un moment avant de  remarquer qu’elle est passée à l’anglais; l’accent, la voix, le débit sont les mêmes… Dix minutes avant c’est le calme, dix minutes après c’est la course. Heureusement que j’ai fait chauffer le moteur et remonté une partie du mouillage.

Bref tout ce petit monde (7 ou 8 bateaux lancés à 50m les uns des autres) fonce dans la nuit entre 6 et 8 noeuds et demi; c’est beaucoup; il y a du courant, dans le bon sens. Les gens nous regardent  de là-haut, prennent des photos.. J’aimerais en prendre quelques unes, ou une vidéo … mais là non. Il faut rester concentré. Parfois un équipier…

Et le mouillage un mille et demi plus loin. Dodo!

Le lendemain vents irréguliers, contraires, changeants en direction, faiblissants, forcissants… Essais divers pour rendre les manoeuvres moins compliquées, modifier le trajet des écoutes, les angles de tire, essayer de comprendre les priorités dans le vent fort, les réglages dans les petits airs… la voile, quoi.

Une escale pas vraiment choisie pour s’abriter du vent d’ouest qui se met à souffler fort… yacht futuriste d’un côté, à 112 mètres de nous (je mesure souvent au télémètre, histoire de vérifier que nous ne bougeons pas), bateau de pêche d’une ferme marine de l’autre, une chèvre, un chien, un garçonnet qui joue, dans le soir qui tombe …

Et puis une escale choisie pour ses douches chaudes naturelles qui se jettent dans la mer, LOUTRA AEDIPSOUS, très ancienne station balnéaire… des photos de ce joli lieu, très ouvert, qui me rappelle un peu SIMI mais avec le charme désuet des villes d’eaux en plus. Photos! :

Le genre d’endroit où l’on se sent en vacances, où l’on retrouve le temps long de l’enfance… Mais demain, que faisons-nous, avec ce vent de NE faible?…  Il nous  faut contourner la ‘tête’ de l’Eubée, aller à l’ouest, puis à l’Est, on ne l’aura pas avec nous dans les deux sens à moins d’attendre quelque part vers le golfe de Volos. Le tout avant le retour d’un régime de Nord fort tôt ou tard. Qui sait, on aura peut-être le temps de retourner aux sources avant de partir et dégonfler l’annexe, ça fait du bien;  même si l’eau de la mer autour n’est encore qu’à 19 ou 20 degrés

UN PONT DE 39M SUR L’EURIPE, ENTRE EUBEE ET BEOTIE…

                 

Des courants forts et capricieux avec un phénomène de seiche connu depuis l’antiquité, qui  défia après d’autres, toute la science d’Aristote.

Une arrivée un dimanche et l’attente de l’ouverture du pont à la nuit tombée pour ne pas bloquer l’intense circulation routière. Une grande ville: CHALKIDA, avec ses 60.000 habitants et ses tentations modernistes, mais une ville où l’on se sent respirer …

 


                                    

Hélas le pont devait ouvrir cette nuit, la météo était parfaite. Il n’ouvrira que mercredi,  d’ici là il peut s’en passer…

DE CAP SOUNION A ERETRIA, OUEST D’EUBEE – EVVIA

On a l’impression d’avancer, comme un escargot, on avance, comme un escargot… et pourtant quand veut mener son blog au rythme de ce chemin molluscule, on a du mal à étaler; la vie va plus vite.

PALAI-FOKAIA et ANAVYSSOU, stations balnéaires un peu quelconques, LAVRION, aussi grande que moche, occupée à 95% par des clônes de location, voiliers de plus en plus gros préparés pour la saison par des  employés qui n’ont pas l’air  bien joyeux. Toujours la tristesse et l’ennui auxquels on reconnaît la recherche exclusive du profit…

                  

Mais j’ai pu faire réparer le hors-bord de l’annexe dans la journée, et je vous souhaite la même réussite  dans le redémarrage de votre motoculteur aux beaux jours!

KARYSTOS  c’est le contraire. Petit port résolument grec, ouvert, où les gens sont sympas et semblent heureux de vivre, nombreux commerces dont trois poissonneries au centre du village! et j’y retrouve même des copains allemands rencontrés à Agia Marina.

                  

Un peu plus loin ce tout tout petit port improbable sur l’île de KAVALIANNI qui ne peut contenir plus de trois bateaux. Une énigme, cette île: de nombreuses routes goudronnées de 5 m de large, mais pas une voiture; de multiples arrivées d’eau et des poteaux électriques comme pour un lotissement, mais pas d’habitations à l’exception d’une maison sur les hauteurs qui semble  abandonnée au milieu du maquis, avec sa piscine (vide) mais sans aucune voie d’accès.

Dans le port un autre voilier, Taravel, appartenant à un couple de français charmants qui naviguent depuis longtemps.

 

Et enfin cap sur ERETRIA où nous allons nous faire coincer contre le quai par un vent du sud; puis du nord, violent, toute la nuit.

Une très belle rencontre que celle de ce compatriote qui habite ici, au bord de la baie, et qui est venu me voir, intrigué par Ponyo. Il  m’a invité à manger chez lui avec sa femme grecque dans leur maison de famille simple, chaleureuse et belle. “Tu veux te doucher?” “Tu as besoin de laver du linge?”… petites phrases auxquelles on reconnaît les gens qui ont bougé; qui se sont mélangés, qui ont du coeur … certains disent “Philoxenia”.

Alors pas de photos et discrétion … je n’en dirai pas plus. Mais après deux jours passés avec eux j’avais le sentiment de les avoir toujours connus. Et j’aimerais les revoir un jour à ERETRIA, jolie ville, et son joli petit musée…

Ce soir le vent  avait tourné, me permettant de quitter le quai sans souci, mais j’ai passé trop de temps à préparer le passage du pont de Chalkida et le vent est repassé sud; il faudra attendre demain pour partir. Mais quel sens de l’hospitalité  et quel bonheur d’avoir pu partager un moment avec ces personnes; de savoir qu’elles existent, ou simplement de pouvoir penser à elles quand parfois je me retrouverai un peu seul sur la mer.

“On ne connaît que les choses que l’on apprivoise, dit le renard. Les hommes n’ont plus le temps de rien connaître. Ils achètent des choses toutes faites chez les marchands. Mais comme il n’existe point de marchands d’amis, les hommes n’ont plus d’amis”

CAP SOUNION: LE PATRON!

   

 

Le patron c’est POSEIDON, bien sûr, et son temple en impose, surtout quand on arrive en voilier sous des rafales irrégulières de vent du nord. On se sent … on se sent chez lui!  Et puis pour nous, pauvres petits yachts, sa puissance est tellement énorme qu’on peut bien se fendre d’une offrande!: un petit verre de “Diplomàtico”, par exemple.. un verre de Rhum plutôt qu’un potiri d’Ouzo… j’espère ne pas avoir commis une grossière erreur… diplomatique pour le coup!

   

 

Ne vous attendez pas à vous trouver seul cinq minutes avec le géant! Ou alors pas plus! Dès 9h30, “opening hour”, il y avait déjà deux bus de seniors “en atelier archéo”  (pourquoi venir en troupeau à la première heure pour être seuls à soixante dix, on se demande..?). Heureusement un des bus repartait en ayant vu le temple de loin depuis la buvette. Et les gens du second ne couraient pas vite. Cinq minutes peut-être, oui,  pour visiter un lieu sacré. Après … ça ou un aéroport …

Une jolie grecque me disait (en anglais!)  que c’était le deuxième site le plus visité après l’Acropole. Le temple d’Aphea, lui, situé sur une île, n’est pas aussi accessible.

Temple de Poséidon et dernier ‘sommet’ du triangle sacré; fortifié tout autour. Temple mais aussi gardien de la très puissante et sourcilleuse Athènes.

   

          

Un dernier temple, promis – je ne m’en lasse pas – après je retourne à la vie de marin:

Eubée (Evvia) côte Ouest,  ou Eubée côte  Est?..   Skyros puis les Sporades, ou le contraire?

Tout dépendra du vent, la côte Est exposée au Meltem (Nord) offre très peu d’abris quand il souffle… mais on annonce du Sud pour plusieurs jours!